Hier et aujourd’hui : cherchez les différences

Als gepensioneerde leraar Frans voel ik nog altijd kriebels als de scholen de eerste september weer open gaan. Ik heb graag les gegeven. En ik blijf met een beroepsmisvorming worstelen : ik voel nog altijd de neiging iedereen de les te lezen. Hier is de Franse les voor vandaag :

Vers 1850

Levez-vous, dit le professeur.

Il se leva ; sa casquette tomba. Toute la classe se mit à rire. Il se baissa pour la reprendre. Un voisin la fit tomber d’un coup de coude, il la ramassa encore une fois.

Débarrassez-vous donc de votre casque, dit le professeur, qui était un homme d’esprit.

Il y eut un rire éclatant des écoliers qui décontenança le pauvre garçon, si bien qu’il ne savait s’il fallait garder sa casquette à la main, la laisser par terre ou la mettre sur sa tête. Il se rassit et la posa sur ses genoux.

Levez-vous, reprit le professeur, et dites-moi votre nom.

Le nouveau articula, d’une voix bredouillante, un nom inintelligible.

Répétez !

Le même bredouillement de syllabes se fit entendre, couvert par les huées de la classe.

Plus haut ! cria le maître, plus haut !

Le nouveau, prenant alors une résolution extrême, ouvrit une bouche démesurée et lança à pleins poumons, comme pour appeler quelqu’un, ce mot : Charbovari.

Ce fut un vacarme qui s’élança d’un bond, monta en crescendo, avec des éclats de voix aigus (on hurlait, on aboyait, on trépignait, on répétait : Charbovari! Charbovari !), puis qui roula en notes isolées, se calmant à grand’peine, et parfois qui reprenait tout à coup sur la ligne d’un banc où saillissait encore çà et là, comme un pétard mal éteint, quelque rire étouffé.

Cependant, sous la pluie des pensums, l’ordre peu à peu se rétablit dans la classe, et le professeur, parvenu à saisir le nom de Charles Bovary, se l’étant fait dicter, épeler et relire, commanda tout de suite au pauvre diable d’aller s’asseoir sur le banc de paresse, au pied de la chaire. Il se mit en mouvement, mais, avant de partir, hésita.

Que cherchez-vous? demanda le professeur.

Ma cas…, fit timidement le nouveau, promenant autour de lui des regards inquiets.

Cinq cents vers à toute la classe! exclamé d’une voix furieuse, arrêta, comme le Quos ego, une bourrasque nouvelle.

Restez donc tranquilles ! continuait le professeur indigné, et s’essuyant le front avec son mouchoir qu’il venait de prendre dans sa toque : Quant à vous, le nouveau, vous me copierez vingt fois le verbe ridiculus sum.

Puis, d’une voix plus douce ;

Eh ! vous la retrouverez, votre casquette ; on ne vous l’a pas volée!

Tout reprit son calme. Les têtes se courbèrent sur les cartons, et le nouveau resta pendant deux heures dans une tenue exemplaire, quoiqu’il y eût bien, de temps à autre, quelque boulette de papier lancée d’un bec de plume qui vînt s’éclabousser sur sa figure. Mais il s’essuyait avec la main, et demeurait immobile, les yeux baissés.

(Gustave Flaubert, Madame Bovary, Première Partie, I)

Aujourd’hui

Je venais de dire à la classe que la situation était grave, qu’on ne pouvait pas travailler sereinement, qu’on passait trop de temps à attendre que les bêtises s’arrêtent, que je ne pouvais pas envisager des sorties sans être inquiète, à la fois pour le comportement et pour la sécurité, qu’ils ne pouvaient pas ainsi continuer à mépriser les adultes qui sont là pour s’occuper d’eux. Rien à faire. Aucune gravité dans leur visage et leur attitude.

La chose la plus frappante, avec ces dizaines d’élèves, c’est l’indifférence presque totale à la parole des grandes personnes. Ils ont l’air de vous dire : « Cause toujours ». Tout, tout, la moindre chose qu’on leur demande et qui est condition du travail, est obtenu de haute lutte. Ne pas se coucher sur la table, mais s’asseoir. Ne pas mettre son ardoise dans sa bouche ou sur sa tête en la balançant dans tous les sens. Ne pas presser son éponge pour faire une mare sur son ardoise, ne pas écraser sa craie dedans pour faire une soupe… Ne pas être quatre à descendre de sa chaise en même temps et se mettre accroupis, voire se jeter à plat ventre par terre, parce qu’un camarade vient de dire à haute voix qu’il a laissé tomber son stylo. Impossible de leur faire prendre au sérieux les consignes de base.

« La maîtresse a demandé trois lettres sur l’ardoise ? J’en fais cinq, c’est pareil. Elle a montré le tracé du chiffre 5 pour que je ne le fasse pas à l’envers ? Je n’ai pas écouté, et d’ailleurs, même si j’ai écouté, je ne le fais pas comme ça, d’ailleurs quelle importance, et même si cela a de l’importance, du moment que je n’ai pas envie. »

Tout cela laisse une impression de violence, la violence de ce que je reçois au jour le jour en tant qu’enseignante de ces enfants agités, irrespectueux, hostiles, agressifs. Violence aussi de la réaction que je suis forcée d’avoir : me fâcher sans cesse, punir, rappeler la loi, dire que c’est grave.

(Rachel Boutonnet, Bonjour Maîtresse, Journal d’une institutrice d’aujourd’hui, 3ième partie, 7)

Conclusion

Nil novi sub sole?